N°47 - Concilier foi et engagement

Angeline Delvart est chargée d’accompagnement social et professionnel au sein d’une association humanitaire « La Mie de Pain » qui vient en aide aux personnes démunies et sans travail. Après plusieurs années de cheminement en catéchuménat, elle a été baptisée en 2014 lors de la vigile pascale.

VDB : Votre vie professionnelle au service de cette association et votre vie de foi sont-elles deux choses distinctes qui n’ont pas à interférer ?

AD: Pour moi, la vie professionnelle dans cette association et ma vie de foi sont liées : cela passe par l’expérience de moments forts vécus au travail avec des personnes que j’accompagne sur plusieurs années dans des chantiers d’insertion.

VDB : Pour vous, qu’est-ce que cela change d’être chrétienne dans votre vie professionnelle ?

AD: Le vrai changement est dans le regard que je porte aujourd’hui sur mon travail. Depuis longtemps, avant même d’être croyante, je voulais travailler dans l’humanitaire. Il y a quelques années, ce chemin a croisé celui de ma foi et m’a fait voir sous un jour nouveau ce désir de servir l’autre, ancré depuis toujours en moi.

VDB : Êtes-vous ouvertement chrétienne, le cachez-vous soigneusement, ou encore le laissez-vous deviner sans l’afficher expressément ?

AD: Dans mon milieu professionnel, les personnes qui dirigent l’association sont catholiques, ce qui n’est pas nécessairement le cas de l’ensemble du personnel. On est dans une société où tout est scindé, c’est difficile dans mon milieu professionnel de dire qu’on est catholique. Les gens ont tellement de clichés sur les cathos ! Il y a des collègues non croyants qui savent que je suis chrétienne. J’ai souvent eu l’impression que j’étais décrédibilisée à leurs yeux : pour eux, j’étais moins compétente parce que j’étais croyante.
S’agissant de la foi, je ne suis pas pour l’afficher spontanément. Afficher sa foi pour quoi et dans quel but ? Pour moi, la foi est une démarche personnelle qui repose sur la conversion du cœur : je préfère laisser deviner ma foi à travers mon attitude.

VDB : Cela veut dire que vous ne parlez de votre foi à personne dans votre milieu professionnel ?

AD: Durant la période au cours de laquelle j’ai cheminé jusqu’au baptême, je n’ai pas parlé de ma foi. J’en ai seulement parlé de manière assumée, une fois baptisée, à quelques collègues bienveillantes : l’une d’elles qui était bouddhiste était très heureuse pour moi. En tout cas, le regard des autres me gêne beaucoup moins aujourd’hui.

VDB : Pensez-vous que la religion doit rester à l’extérieur de l’entreprise ?

AD: Un exemple : il y a une croix dans la salle à manger à « la Mie de Pain ». La simple présence de cette croix fait débat au sein de l’association. Je trouve cela dommage !
Cela étant, et de manière générale, je crois que l’on doit respecter les règles qu’impose la vie professionnelle.